"C'est la vie!"-Vanités de Caravage à Damien Hirst au Musée Maillol

J'ai toujours été fascinée par le monstrueux dans l'Art, les cabinets de curiosités, les Vanités, les Métamorphoses, les Hybrides, bref, tous ce qui peut paraître dérangeant et étrange.

Depuis l'exposition Mélancolie au Grand Palais (pour moi, la plus merveilleuse des expositions jamais faite depuis que je vis à Paris), je n'avais pas revu d'exposition consacrée à cette part d'ombre, ce sentiment dérangeant, cette condition qui nous attend un jour ou l'autre: la mort.

La mort, énorme tabou de la société de consommation de masse, qui fait semblant d'ignorer ce qui l'attend en consommant sans relâche sans penser au génération à venir. En n'ayant aucune conscience que ce qui mènera à sa perte c'est l'ignorance de la mort.

L'exposition "C'est la vie!!" prend le contre pied en mettant la mort à l'honneur, représentée par des Vanités toutes plus belles les unes que les autres.

La première exposition organisée par Patrizia Nitti, la nouvelle directrice artistique de la Fondation Dina Vierny - musée Maillol, « C’est la vie!! - Vanités de Caravage à Damien Hirst! » présente environ 150 oeuvres: peintures, sculptures, photographies, vidéos, bijoux et objets en tout genre.

Le Caravaggio

Damian Hirst

Les Vanités s’introduisent dans le domaine de l'art contemporain avec des oeuvres majeures du XXIème siècle telles que les gants d'Annette Messager en forme de crâne, la Vanité en diamants de Damien Hirst, ...tous les supports livres, pochettes de disques, bijoux sont déclinés autour de ce thème...

Cette exposition est pour moi une belle allégorie du monde dans lequel nous vivons: décrépitude de l'intellect et du spirituel, démembrement de la socièté, agonie d'une planète mondialisée en proie à la menace écologique, désacralisation de la vie et de la mort dans les pays occidentaux, ...La Vanité souligne le nombrilisme de cette société qui s'égare dans sa soif de contrôle. La tête de mort, autrefois iconographie contestataire ou effrayante devient aujourd'hui banale, elle ne choque plus. Le contre-culturel devient culturel. (cf: le crâne avec des oreilles de Mickey).

Dans cette exposition, nous pouvons voir un ballet de crânes: sur des mosaiques de Pompei,  en peinture, en sculpture, en couleur, en noir & blanc, en mortadelle, en pastèque, en bois, en aubergine,... On passe du réalisme au surréalisme, du repoussant au grotesque... On voit des cannes, des boîtes, des mini-cerceuils, des squelettes (comme le fascinant tableau de Spoerri), des anamorphoses, j'ai faillit en pleurer tellement c'était beau! On passe de Pompei à Braque, de Picasso à Hirst, d' Hélion à Caravage, de Pierre et Gilles à Robert Mapplethorpe, de Cezanne à Jean Pierre Raynaud. Aussi, pour l'occasion, Yves Gastou a prêté sa collection de bijoux d’homme. Et surtout, on peut découvrir pour la première fois exposé en France, un ensemble important de pièces issues de l’extraordinaire collection Codognato de Venise (le joaillier le plus secret des bijoux-vanités collectionnés par Manet, Cocteau, Wharol, Elton John pour ne citer qu'eux…)

Richter

Braque

Barcelo

Abramovic

Cézanne

Alberola

Tout n'est que vanité, mais que de beautés, je suis en émoi devant Witkin, en transe devant George de La Tour, en alerte devant Max Ernst, quant au Cézanne, ouaah!… Cette exposition est vraiment incroyable, que de splendeurs, de quêtes spirituelles et philosophiques. Des oeuvres pour exorciser, dompter et sublimer celle que l'on veut voir le plus tard possible.

Tant d'oeuvres réunis pour nous mettre face à notre destin, face à notre perte de sens...notre esprit est abruti par ces images de mort que l'on regarde comme une publicité pour un paquet de chips. La mort a été  vidée de son signifiant jusqu'aux têtes de mort, devenues quand à elles des jouets ou des accessoires pour ados boutonneux allant à Japan Expo. La société de consommation s'approprie même le plus intime des sentiments: la peur de mourir.

Cette idée de la fin impossible à stopper, cette peur de la mort est brillamment représentée dans cette exposition, un vrai bonheur!

Memento mori. "Souviens toi que tu vas mourir".

Du 3 février au 28 juin 2010
Tous les jours de 10h30 à 19h sauf les mardis et jours fériés
Tarif : 11 euros
Tarif réduit : 9 euros

Musée Maillol
59-61, rue de Grenelle
75007 Paris
Métro Rue du Bac (ligne 12)